Homoalpinus

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Les roches

Il existe plusieurs critères de classification des roches. On peut par exemple les répertorier en fonction de leur composition chimique, on déterminera alors deux familles :

- les roches silicatées qui sont le plus souvent des roches magmatiques et métamorphiques. On trouve aussi des roches sédimentaires constituées de minéraux silicatés ainsi que des péridotites
- les roches non silicatées qui sont principalement des roches carbonatées (essentiellement des roches calcaires)

Un autre de ces critères, celui que l'on retiendra, consiste à les classer en fonction de leur génèse :

      - les roches exogènes
      - les roches endogènes

Ces deux groupes, peuvent être eux-mêmes subdivisés en plusieurs sous-groupes. Ces derniers, au nombre de trois, les roches magmatiques, les roches sédimentaires, et les roches métamorphiques, sont impliqués dans la construction des Alpes

Tableau - Lithologie

1. Les roches exogènes, formées à la surface de l’écorce terrestre.

    1.1. Les roches sédimentaires résultent de l’accumulation d’éléments et/ou de précipitations à partir de solutions ayant de nombreuses variantes de très dures à très tendres. Elles se sont formées en surface, à partir de sédiments constitués de particules issues de l’érosion des continents ; elles se déposent après avoir été transportées. Ces particules peuvent être unies par un ciment. Un des trait principaux des dépôts sédimentaires est la stratification souvent bien visible dans le paysage alpin. Dans les Alpes, la plupart des roches sont sédimentaires.

        - les roches sédimentaires détritiques, sont issues de l’altération d’autres roches préexistantes (molasse, pélites, grès, flysch, verrucano) qui peuvent être tendres (sable et argile) ou plus résistantes comme les conglomérats (poudingue)


Poudingue de la terrasse fluvio-glaciaire de Mont-Dauphin

       - les roches biogènes et/ou physico-chimiques non formées à partir de roches préexistantes (calcaires avec une stratification très prononcée, composés de coquilles de calcite de créatures marines mortes, roches siliceuses dolomie, gypse, les cargneules, marnes, schistes lustrés, quarzites orthoquartzite)



Calcaire de Finale Ligure (Pietra di Finale) bioclastique à ciment calcitique riche en éléments terrigènes d'âge miocène

2. Les roches endogènes, formées au moins en partie à l’intérieur du globe, à des températures et à des pressions supérieures à celles régnant à la surface. Ce sont des roches silicatés

     2.1. Les roches magmatiques (ou roches ignées) naissent de la solidification de magmas (bains silicatés fondus) tant à la surface que dans la profondeur de la croûte terrestre

            2.1.1 Les roches magmatiques intrusives ou roches plutoniques (roches cristallines) refroidies lentement en profondeur de la croûte ou du manteau après une cristallisation lente.
Dans les zones supérieures de l'ancien magma se trouvent les granites, granodiorites (granitoïdes), dans les régions moyennes les ophiolites, diorites, gabbros, et dans les plus profondes les péridotites.


Gabbro du Chenaillet - Type Troctolite (structure grenue - Les principaux minéraux sont le pyroxène (brun), la hornblende (brun) et l'olivine (taches vertes) et le plagioclase (blanc) = Feldspaths sadi-calciques-198 Ma .

            2.1.2 Les roches magmatiques extrusives (ou effusives) ou roches volcaniques se forment en surface après une cristallisation rapide (basalte, porphyre de quartz, rhyolitte, trachyte, porphyre). Dans les Alpes les roches volcaniques sont rares, elles se trouvent principalement le long de la frontière alpino dinariques.


Porphyre quartzifère - Plateforme porphyrique atésine - Permien inférieur 260 Ma

     2.2 Les roches métamorphiques (roches cristallophylliennes) sont formées par la transformation de toutes roches sédimentaires ou éruptives en roches métamorphiques par des phénomènes mécaniques, conditions thermodynamiques, thermiques et chimiques, notamment une élévation de la température (fusion complète au-dessus de 800° jusqu'à 1.200°) et de la pression (environ 2.500 Kg/cm2) différentes de celles de leur formation. Ce sont habituellement des roches d'une grande dureté.
Le métamorphisme peut être léger (schistosité), plus poussé, provoquant une recristallisation fine (micas), ou grossière (gneiss). Lorsqu’on peut déterminer la provenance on distingue les roches métamorphiques d'origine « ortho » issues de roches magmatiques, et celle d'origine « para » correspondant à d'anciens sédiments.

Gneiss : migmatite
Schistes : micaschiste, schistes verts, (Niedere Tauern, Sud-Tyrol, Lombardie, Piémont, Zillertal, Tessin)
Roches métamorphiques non schisteuses : Quartzite (métaquartzite), éclogites (Hohe Tauern), amphibolite (Hohe Tauern, Massif du Saint-Gothard), serpentinite (Tyrol, Carinthie, Waldviertel/Basse-Autriche, Grisons/Suisse, Ligurie), ophiolite, cipolin (Piémont), marbre.

On les trouvent dans les Alpes très souvent dans les massifs autochtones et le long de la crête principale


Migmatite - Gneiss granitisé - Vallée de la Gordolasque


Micaschiste

Tableau - Lithologie

Les minéraux dans les Alpes

Les minéraux sont constitutifs des roches. Les Alpes semblent être une mine inépuisable, mais si la plupart des minéraux existent dans le massif, ils n’y sont présents qu’à une échelle réduite. Les pièces intéressantes demeurent rares en raison entre autres de la fermeture des mines. Le quartz, le feldspath et le mica sont les plus courants au sein de l’arc alpin. Les quartz les plus purs sont rares, il s’agit du cristal de roche, de l’améthyste et de l’agathe.
Les minéralisations les plus courantes sont :

Les minéraux silicatés représentent 90% des minéraux. La silice est l'élément principal


Quartz

De l’aube de l’humanité à la renaissance

Les premiers habitants du massif utilisent déjà le quartz et les métaux. Bien avant l’antiquité, le cristal de roche est convoité, le cuivre exploité dans le Queyras par exemple. Les Romains, puis les Sarrazins  commencent à tirer parti des mines (quartz du Gothard).

Avec le moyen âge, la recherche du cuivre, du plomb, du fer et de l’argent constitue une activité importante dans les Alpes. Durant les XIIe et XIVe siècles, les Italiens, les Allemands et les Anglais envient les gisements métallifères de Savoie (Brandes à l’Alpe d’Huez).

Le Massif de Belledonne et le karst subalpin sont exploités par des moines.

À la Renaissance, les exigences d’une extraction de plus en plus profonde nécessitent une technique plus sophistiquée. Les minéraux du Piémont et de Savoie sur ordre du Duc de Savoie Charles-Emmanuel 1er sont répertoriés tandis qu’au XVIe siècle les Suisses mettent l’accent sur la recherche du quartz.

Au XVIIIe siècle, la découverte du filon de quartz aurifère de la Gardette près du Bourg d’Oisans génère l’apparition premier lingot d’argent. On y détecte également des géodes, ces masses rocheuses arrondies dont l’intérieur est tapissé de cristaux de quartz telle l’améthyste.


Géode

Les Lumières : avènement d’une science.

Pendant la révolution, la création de l’École des Mines à Paris, alors baptisée « École des mines du Mont-Blanc » et dirigée par le Saxon Schreiber ex-administrateur de la fonderie de la Gardette, voit le jour. En 1802, l’établissement est transféré à Peisey en Tarentaise, puis en 1836 à Turin. La qualité de son enseignement contribue au progrès de la géologie alpine et à la formation de scientifiques de renom.

L’amélioration des connaissances de la géologie attire des savants et des aventuriers qui explorent des terrains privilégiés comme le Dauphiné, le Piémont, le Valais et Le Tyrol (en particulier la Zillertal).

La minéralogie nait à cette période grâce à l’Abbé français René-Just Haüy et au géologue allemand Abraham Gottlob Werner. Les mines du Piémont et des Alpes maritimes suscitent l’intérêt des Italiens Di Robilant, Barelli  et Rocati.

Mais, c’est la Suisse qui est véritablement à l’avant-garde dans ce domaine scientifique. Les gisements de la haute vallée du Rhin dans les Grisons sont exploités depuis longtemps. Le père Placidus dresse une première carte des gîtes minéraux alpins et crée une collection de beaux spécimens.

Cristallier : émergence d’un métier à haut risque

Dès le XVIIIe siècle, l’activité de cristallier devient officielle.

La recherche de minéraux s’effectue à une altitude élevée soit dans des roches brisées, soit en pleine paroi dans des fissures aussi appelées « four ». Le cristallier ou « Strahler » en langue allemande repérera une veine de quartz (indice révélateur de la présence de cristaux) insérée dans des dalles granitiques. Les contours des cristaux présentent une extrême fragilité, il faut les manipuler avec précaution.

Ce métier requiert une grande connaissance du milieu montagnard et un talent d’alpiniste aguerri. La beauté des pierres et la fascination qu’elle exerce génèrent une demande sans cesse croissante. De nombreux récits décrivent les aventures des cristalliers, l’importance économique de cette activité pour la vie des autochtones et les dangers qu’elle comporte.  Roger Canac  (L’Or des cristalliers, 1980) en France et le moine valaisan Benoît Bickel (Jo Vagant le cristallier, 1976) font partie des écrivains représentatifs de cette littérature. Cette profession se transmet fréquemment de génération en génération, c’est le cas des Imhof et Rufibach en Suisse, des Steiner en Autriche. En France, certains noms prestigieux restent en mémoire ; Napoléon Albertazzo, Roland Chincholle, Daniel Lagarde, etc. Les Italiens Claudio Albertini ou Angelo Bianchi, demeurent des figures emblématiques du Piémont notamment pour leurs trouvailles dans le val  Dévero.

« De tout et de tout un peu »

Si les gisements sont relativement pauvres en minerais, leur diversité représente un sujet d’étude scientifique important.

Ainsi les gîtes de Lengenbach dans la vallée de Binn en Suisse sont riches en sulfures rares. Le Massif des Écrins en Oisans, recèle de la charbouneite, du thallium, de l’argent, de l’arsenic, du mercure et de l’antimoine. La chalcostibite, la zinkénite situées dans des « lentilles » veines de roches de forme aplatie sont extraites près de Barcelonnette, à Saint-Pons dans les Alpes-de-Haute-Provence. Plus au sud, dans les Alpes-Maritimes, les terrains volcaniques du Permien  offrent une abondance de cuivre et d’argent.  

Dans les cours d’eau ou dans certains filons de quartz on découvre des paillettes ou des pépites d’or : c’est le cas en Suisse centrale (entre Berne et Lucerne) et dans le Val d’Aoste italien.

Dans le Piémont et l’Isère on localise des pétales de sidérites, des aiguilles de quartz et des sulfures et en Slovénie des minéraux colorés issus de la décomposition des sulfures comme l’azurite ou la wulfénite. L’uranium est aussi présent en Savoie et Haute-Savoie.

Les ressources précieuses des fentes alpines

Les carpholites, les chlorites, les grenats comptent parmi les minéraux des roches métamorphiques situées dans les Alpes penniques. Des pierres précieuses comme des émeraudes (micaschiste de l’Habachtal), ou des rubis (dolomie de Campolungo dans le Tessin en Suisse) viennent compléter la diversité des minéraux alpins.

La serpentine et d’autres roches vertes volcaniques métamorphisées contiennent parfois du chrome, du nickel, de l’amiante (Balangero dans le Piémont ou en Maurienne, en Savoie).
On note la présence de beaux cristaux de gypse, anhydrite, évaporites, etc. dans les roches sédimentaires.

Les roches magmatiques renferment de superbes tourmalines enchassées dans certaines veines de pegmatites anciennes  (Massif de l’Adamello, Baveno près de Verbania sur le lac Majeur). On trouve également des Béryls.

La spécificité alpine réside dans ses fentes desquelles on  extrait des cristaux de quartz. Les chaines du Mont Blanc et de l’Aar (Oberland, Suisse) recèlent améthystes et gwindels. Ces fentes alpines sont caractéristiques des massifs cristallins externes.

Le patrimoine minéral alpin

La grande diversité des minéraux de la chaine alpine représente un véritable patrimoine qui suscite un réel engouement. Les bourses de ventes et d’échanges de Grenoble, Chamonix ou Disentis attirent de nombreux amateurs.

Sans les cristalliers considérés longtemps comme des pilleurs et les collectionneurs  la sauvegarde de minéraux consignés dans des musées serait compromise, d’autant que l’altération inévitable dans les conditions naturelles accélère la disparition de certains spécimens.

Beaucoup de minéraux restent encore enfouis dans les profondeurs de la terre et le lent travail d’érosion des montagnes révèlera sans doute un jour la présence de nouveaux trésors.

Les fossiles alpins

Ils représentent des restes d'animaux ou de végétaux enserrés dans les roches sédimentaires.


Ammonite


Empreinte d'Ammonite


Gastéropode - Turritella Turris