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L’ALPINISME

Le 26 février 2018, les maires de Courmayeur en Italie et de Chamonix en France se sont réunis pour porter un dossier de candidature de l’alpinisme devant l’UNESCO, au titre de patrimoine mondial immatériel de l’humanité.

Comment définir l’alpinisme ? Ötzi, la momie dont les restes ont été retrouvés en 1991 par des randonneurs dans un glacier à la frontière entre l'Italie et l'Autriche était sans aucun doute, trois mille ans av.J.C, déjà un alpiniste. Son équipement démontre sa formidable faculté d’adaptation à ce milieu hostile.
Pour Roger Frison-Roche, l’alpinisme « c’est uniquement la notion de danger et la technique forgée par l’homme pour déjouer ses dangers qui constituent ce qu’on nomme communément l’alpinisme ». Il ajoute « À l’inverse du touriste qui recherche surtout la détente et la beauté, l’alpiniste se complait dans la difficulté à vaincre, dans le danger à surmonter, dans une lutte ardente contre les éléments et la nature ».

De tous temps les hommes ont exploré les montagnes, soit par nécessité, les bergers, les marchands, les braconniers, les chasseurs, soit par soif de découverte ou de conquête.

Le spécialiste des religions Odon Vallet ajoute aux multiples motivations qui génèrent le désir d’ascension des montagnes, un aspect mystique. De nombreux ecclésiastiques, les abbés Davin dans l’Oisans, Audoubert dans les Pyrénées ou Achille Ratti (le futur pape Pie XI) dans les massifs du Mont-Blanc et du Mont-Rose, Giovanni Gnifetti dans le Mont-Rose ont gravi les sommets les plus prestigieux. Les protestants, le révérend Hudson et le pasteur Coolidge marquent eux aussi l’histoire de l’alpinisme. Dans les années 1930, la mystique nationaliste fait référence aux valeurs véhiculées par l’alpinisme ; en ces années troubles, chaque pays souhaite être « premier de cordée » et les alpinistes des nations européennes concernées par la Seconde Guerre mondiale s’affrontent dans une âpre compétition.

Il n’y a pas un alpinisme, mais des alpinismes.

La préhistoire de l’alpinisme

- 5320-5100 ans - Ötzi se trouve sous la crète du mont Similaun à 3 200 m entre le Niedertal (Ötztal) et le Val Senales (Tyrol Nord et Sud). Cette région alpine est fréquentée par des chasseurs et bergers du paléolitique (8300 ans av.J.C)

- Les gravures de la vallée des Merveilles dans le massif du Mercantour (Alpes-Maritimes) datées de 3300 ans avant J.-C, et celles de la Valcamonica répertoriées à partir de la période Mésolithique (VIII-VI millénaire av. J.-C.) jusqu’à l’époque de l’empire romain attestent de la présence de l’homme dans les Alpes.

- En 218 av. J.-C., Hannibal Barca parti à la conquête de Rome traverse la chaine alpine avec une armée de 60.000 hommes.

- Les légions romaines, dans une logique de conquête franchissent les cols les plus importants des Alpes.

Les origines de l'alpinisme sont liées à des évènements isolés. Quelques ascensions emblématiques :

- Le 27 avril 1336, le poète esthète toscan Pétrarque s’élève au-dessus des oliveraies pour attendre le sommet décharné, balayé par le Mistral du Mont Ventoux (1 909m).

- Le 1er septembre 1358, Bonifacio Rotario d’Asti (Italie) porte au sommet du Rochemelon (Rocciamelone) à 3 557 mètres un triptyque en bronze de la Vierge. Depuis, un pèlerinage s'y déroule chaque année.


Triptyque du Rochemelon - Texte gravé :"Hic me aportavit Bonefacius Rotarius, Civis Astensis, in honorem Domini Nostri Jesu Christi et Beate Marie Virginis. Anno domini MCCCLVIII die I september”

- L’alpinisme sportif commence avec Antoine de Ville, seigneur de Domjulien et de Beaupré, qui se hisse au sommet du Mont Aiguille (2 085 m), sur ordre du roi de France Charles VIII, en juin 1492 à l’aide d’échelles, de cordes et de crochets de fer.

- Entre 1490 et 1499, l ’artiste/scientifique Léonard da Vinci, alors Commissaire pour la Valsassina (province de Lecco), explore les "Grigne" (Préalpes lombardes) sur commande de Ludovico Sforza dit "il Moro", à la recherche de mines de fer et de cuivre, matériaux utiles à la forge pour la guerre des Milanais.
Au début du XVIe siècle, le même Leonard de Vinci s'aventure sur les pentes du Monboso  (Mont-Rose) ou Mont Bo (Préalpes de Biella).

Au XVIe siècle se déroule une série de premières ascensions dans les Alpes suisses.
Durant cette période on vit partir en direction des sommets aussi des érudits suisses comme Vadianus (Joachim de Watt) qui en 1518 grimpe le Gnepfstein, sur la chaine du Pilatus. Aussi Johann Rhellicanus (Johann Muller) qui en 1534 atteint le Stockhorn, une modeste cime au pied de l'Oberland Bernois.
Tout comme Conrad Gesner, un professeur et botaniste de Zurich qui gravit le Gnepfstein et le Niesen, premier théoricien de la valeur culturelle et du plaisir d'aller en montagne.

Mais le siècle suivant verra un recul de l'intérêt pour la haute montagne que l'on n' hésite pas à nommer "Monts maudits" ou "Mont affreux".

Le XVIIIe siècle marque un moment décisif

L’avènement de la nature dont le philosophe Jean-Jacques Rousseau se fait le plus fervent apologiste est un élément déterminant d’une nouvelle pratique. Scientifiques et aventuriers s’intéressent aux Alpes désormais devenues objet d’étude et de fascination après des siècles de rejet et de crainte.

Le mois d' août 1778 voit une entreprise collective de sept garçons Walser de Gressoney (Vallée d' Aoste) grimper les « quatre mille » du Mont-Rose, autour du col du Lys, à la recherche de la mythique vallée perdue de leurs pères.

En 1760, le jeune encyclopédiste genevois Horace-Bénédict de Saussure qui admire le Mont-Blanc du sommet du Brévent réalise que le sommet de l’Europe sera aussi la montagne de sa vie. Un quart de siècle plus tard, le 8 août 1786, le médecin Michel-Gabriel Paccard et le cristallier Jacques Balmat rejoignent à 4 807 mètres le toit de l’Europe. De Saussure, lui, effectuera l’ascension emportant avec lui de pesants instruments de mesure l’année suivante.

La conquête du Mont-Blanc préfigure ce qui deviendra une discipline à part entière, l’alpinisme. Vingt-cinq ans de lutte pour accéder au toit de l’Europe permettent de forger les techniques utilisées en alpinisme et de « développer chez les hommes des conceptions alpines très différentes » écrit Roger Frison Roche. Le métier de guide se précise, un matériel adapté au terrain et conditions fait son apparition. « On apprend à connaître les crevasses, les dangers des avalanches, les qualités de la neige » ajoute l’écrivain.

Les Alpes : terrain de jeu de l’Europe

Le XIXe siècle, est marqué par la conquête des plus grands sommets alpins.

Dès la première décennie, certaines cimes sont gravies :

1800 : le Grossglockner (3 798 mètres) point culminant d'Autriche.

1804 : l’Ortler (3 905 mètres) Tyrol Sud.

1811 : La Jungfrau (4 158 mètres) Suisse.

Vers la moitié du XIXe siècle, les sommets les plus prestigieux cèdent aux assauts des alpinistes tels Whymper, Walker, Matthews, Tyndall, Tuckett et Coolidge, etc. qui donnent leur nom à des itinéraires de grande difficulté.

De la pointe Dufour au Mont-Rose (1855), en passant par l’ Aletschhorn (1859), le mont Viso (1861), la Barre des Écrins (1864), l’Aiguille Verte (1865), les Grandes Jorasses (1865) les cimes les plus légendaires sont gravies durant cette période où l’activité s’organise peu à peu, les techniques s’améliorent et permettent de véritables prouesses sportives. L’ascension du Cervin (Matterhorn) en 1865, marquée par la tragique disparition de quatre personnes fait partie de ces exploits. Ainsi, l’alpinisme devient une spécialité à part entière s’émancipant de ses missions scientifiques. Parallèlement au développement de l’expertise naissent les clubs alpins et les refuges.
Sous l’égide de l’Alpine Club de Londres les paysages alpins seront immortalisés à travers des récits, photographies ou peintures. « Le terrain de jeu de l'Europe » (1871) de Leslie Stephen et « Escalades dans les Alpes » (1873) de Whymper.

Notons aussi l'arrivée vers la fin du XIXe et au début du XXe siècles d'une nouvelle forme de ski : le ski-alpinisme.

Deux visions antagonistes de l’alpinisme

Désormais, les grands sommets ayant été atteints par les voies plus accessibles, les alpinistes se heurtent à de nouvelles difficultés techniques : certaines parois rocheuses demeurent infranchissables.
Ainsi, l’Anglais Albert Frederick Mummery et le guide suisse Alexandre Burgener se trouvent désarmés au pied de la dent du Géant. Le problème sera résolu en 1882 par des Italiens, les frères Sella et le guide Marquignaz qui viendront à bout du mur terminal à l’aide de pieux et de perches.

Ainsi nait la très controversée escalade artificielle…

Durant la même période, sur les parois vertigineuses des Dolomites, les contrebandiers et chasseurs pratiquent une escalade plus traditionnelle. Le tourisme n’a pas encore fait son apparition dans cette partie des Alpes orientales. En 1887 le jeune Allemand Georg Winkler ouvre la voie éponyme qui le conduit au sommet de la première tour du Vajolet dans le massif du Catinaccio (Rosengarten).

En cette fin de siècle, deux visions antagonistes de l’alpinisme émergent : Celle, anticonformiste et avant-gardiste de Tita Piaz et celle de Paul Preuss adepte inconditionnel de l’escalade libre sans aide artificielle.

La fin du XIXe siècle se caractérise par une pratique de plus en plus sportive. Toutes les formes actuelles de l’activité se révèlent à cette période : courses en solitaire, hivernales, traversées, enchainements, etc. On explore des parois encore vierges exigeant un niveau de compétences toujours plus élevé.

Durant la Première Guerre mondiale, les Dolomites où s’affrontent Autrichiens et Italiens sont le théâtre de véritables prouesses techniques. Des galeries sont creusées dans le rocher et les conditions extrêmes dans lesquelles luttent les soldats s’apparentent à celles que des alpinistes chevronnés pourraient rencontrer. La Grande Guerre emporte avec elle de brillants grimpeurs, notamment Hans Dülfer l’inventeur de l’escalade dite « en opposition ».

L’alpinisme un outil de propagande

Les alpinistes à la recherche constante de la difficulté vont alors se lancer à l’assaut des grandes faces.
On assiste dès 1925 à la naissance du sixième degré avec l’ouverture par les Allemands Emil Solleder et Gustav Lettenbauer de la fameuse voie Solleder dans la face nord-ouest de la Civetta. L’escalade rocheuse se déroule d’ailleurs principalement dans les parois déversantes des Dolomites où Allemands et Italiens rivalisent d’audace.
À la veille de la Seconde Guerre mondiale, les grandes faces nord représentent un objet de fascination et de conquête.
L’alpinisme symbolise en outre l’héroïsme et la force physique et mentale que l’idéologie nazie et fasciste met en exergue.
1931 : la face nord des Grands Charmoz dans le massif du Mont-Blanc est gravie par le guide allemand Anderl Heckmair.
Entre 1931 et 1938 : Les 3 grandes faces nord des Alpes : le Cervin, les Grandes Jorasses et l’Eiger, des itinéraires mixtes très complexes et de plus de 1000 mètres d’envergure vont être réalisés.
Le brillant grimpeur italien Emilio Comici, créateur de l’école d’alpinisme italienne ouvre dans les Dolomites des voies d’extrême difficulté pour l’époque.
Ricardo Cassin, un autre alpiniste italien d’exception, trace « ses » itinéraires sur la Cima Ovest di Lavaredo (1935), au Piz Badile (1937) et à l’éperon Walker en face nord des Grandes Jorasses.
Giusto Gervasutti, Pierre Allain, Armand Charlet, Louis Lachenal, Lionel Terray et Gaston Rébuffat font partie des « grands » noms de l’alpinisme.
Ces conquêtes ne se font pas sans drames et la face nord de l’Eiger en est un triste exemple. Les Allemands Andreas Hinterstoisser et Tony Kurz ainsi que les Autrichiens Edi Rainer et Willy Angerer, tous les quatre expérimentés et talentueux, ne survivront pas à leur ascension en 1936. L’année précédente, les deux alpinistes bavarois Hans Sedlmayr et Karl Mehringer disparaissaient également à l’issue de leur tentative. C’est en 1938 que la paroi nord de « l’ogre » se laisse dompter par les Allemands Anderl Heckmair et Ludwig Vörg et la cordée autrichienne de Heinrich Harrer et Fritz Kasparek. Cet exploit nourrit la propagande nazie, mais la Seconde Guerre mondiale va ralentir de manière conséquente la progression de l’alpinisme.

Les années d’après-guerre ou la recherche de la difficulté

Au sortir du conflit, l’écrivain et journaliste italien Enrico Camani auteur avec Gian Piero Motti de « La Storia dell’alpinismo » (l’Arciere-Vivalda, 1994) considère que l’alpinisme prend deux directions bien distinctes :

D’une part, le désir de réaliser des voies extrêmes avec des itinéraires les plus directs possible en paroi raide, voire déversante, de type dolomitique ; la face ouest du Dru dans le massif du Mont-Blanc ouverte en 1952 par Lucien Bérardini, Guido Magnone, Adrien Dagory et Marcel Lainé représente un exemple de cette tendance. Walter Bonatti marque également son époque sur ce même Dru, et sur le Grand Capucin.

D’autre part, l’attrait pour les hivernales où s’illustreront les Français Jean Couzy et René Demaison avec la face ouest du Dru, les Allemands Toni Hiebeler et Toni Kinshofer avec la face nord de L’Eiger ou encore les Italiens Walter Bonatti et Cosimo Zapelli avec l’éperon Walker aux Grandes Jorasses.

En 1957, Dieter Flamm et Walter Philipp tracent « la voie du futur ». Le « dièdre Philipp-Flamm » est ouvert avec une grande économie de moyens, et préfigure un retour à l'escalade libre. Il faudra trois jours aux alpinistes pour gravir la paroi nord-ouest de la Punta Tissi de la Civetta dans les Dolomites orientales ( 800m, 40 pitons ). Comme l’écrit Pietro dal Pra, « sur ces parois, s’est formée une culture de l’escalade pure qui n’a pas eu d’égale dans l’histoire de l’alpinisme. Ici se sont écrits les chapitres les plus intenses de l’escalade alpine, de la fin du XIXe siècle à aujourd’hui. »

Le Marseillais Georges Livanos dit « le Grec » s’inscrit dans cette culture. Il ouvre de nombreux itinéraires dans les Calanques et dans les massifs alpins (Mont-Blanc, Vercors, Oisans) et en particulier dans les Dolomites comme la face nord-ouest de la Cima Su Alto (1951), l'éperon ouest du Sasso Cavallo (Piz dl’Ciaval 1953), alternant escalade artificielle et escalade libre. Sa principale compagne de cordée, son épouse Geneviève, dite « Sonia », se révèle une des pionnières du sixième degré féminin. Dans son ouvrage majeur, « Au-delà de la verticale » (Arthaud 1958 réédité chez Guérin en 1997), son humour décapant contribue à démystifier l’aspect héroïque de l’alpinisme mis en exergue dans les idéologies nationalistes d’avant-guerre.

À partir des années soixante, l’escalade gagne son indépendance

C’est entre autres l’influence des grimpeurs californiens comme Gary Hemming, John Harlin et d’autres conquérants des parois granitiques du Yosemite qui contribue à une nouvelle conception de l’alpinisme. L’ascension se déroule désormais avec des protections amovibles. L’escalade libre et « propre » par opposition à l’escalade artificielle qui utilise en abondance les pitons voit le jour. À partir des années soixante, à l’instar de l’émancipation de l’individu, l’escalade devient une discipline à part entière.
L’Italien du Sud-Tyrol Reinhold Messner ouvre avec son frère Gunther de nouveaux itinéraires dans les Dolomites. Les frères Messner avoisinent le septième degré (VIII cotation UIAA), difficulté surréaliste alors, qu’ils concrétisent en juillet 1968 sur un mur exposé de 4 mètres dans le « Pilastro di Mezzo del Sass dla Crusc » du massif des Cunturines. S’en suivra l’édition d’un livre capital dans l’histoire de l’escalade rocheuse « Le 7e degré » écrit par Reinhold Messner.

Pour autant, l’alpinisme n’a pas perdu de sa vitalité. Des techniques innovantes permettent une progression dans le secteur glaciaire : le piolet-traction offre de nouvelles possibilités sur des cascades de glaces, des goulottes. Les Français Jean-Marc Boivin, Patrick Gabarrou, les Italiens Giancarlo Grassi développent une réelle expertise dans ce domaine. Avec l’apport de ces techniques, l’alpinisme revêt un caractère de plus en plus sportif : en 1985, Christophe Profit enchaine en vingt-quatre heures les trois grandes faces nord des Alpes : Eiger, Cervin et Grandes Jorasses.

Parmi les dérivés de l'alpinisme, le ski extrême apparait dans les années soixante avec le skieur suisse Sylvain Saudan. Plus tard dans la lignée d'un Heini Holzer, Patrick Vallençant ou encore Toni Valeruz, cette discipline devient plus médiatique dans les années 1980 grâce aux exploits de l'éclectique Jean-Marc Boivin.

Durant cette période, l’escalade après s’être affranchie des règles, s’institutionnalise. Patrick Edlinger, et Catherine Destivelle qui ont popularisé cette discipline, la considérant davantage comme un mode de vie qu’un véritable sport malgré le niveau de technicité exigé, se professionnalisent. Les Français Patrick Berhault, les frères Le Ménestrel, les Italiens Maurizio Zanolla, Luisa Iovane, l’Autrichien Heinz Mariacher, Les Allemands Stefan Glowacz et Wolfgang Güllich participent à une courbe ascendante de progression. Il faudra seulement vingt ans pour passer du septième au neuvième degré. L’arrivée de la compétition contribue certainement à l’explosion du niveau : les athlètes suivent désormais des programmes d’entrainement rigoureux. Alors qu’elle existe déjà depuis les années cinquante en URSS, la première compétition internationale se déroule à Bardonecchia en Italie en juillet 1985 et ce, malgré le manifeste à charge contre ce mode de pratique signé par une vingtaine de grimpeurs.

La compétition est devenue incontournable en ce début de XXIe siècle et sera représentée aux Jeux olympiques de Tokyo en 2020. Elle se décline en trois disciplines : la difficulté, la vitesse et le bloc. C’est l’ IFSC (International Federation of Sport Climbing) qui organise depuis 2007 les événements sportifs internationaux (coupe du monde, championnat du monde) et travaille à l’intégration de la discipline au JO auprès du CIO depuis 2007.

Quel alpinisme pour le XXIe siècle ?

L’alpinisme moderne adopte plusieurs orientations.

- Il existe une tendance sectorielle, ou chaque spécialité est individualisée et requiert un haut niveau de technicité ; c’est le cas de la cascade de glace, par exemple. L’Ultra-Trail du Mont-Blanc remporté à plusieurs reprises par l’Espagnol Kilian Jornet peut être considéré comme une forme d’alpinisme.

- L’ascension en libre de voies classiques difficiles et les ouvertures de voies extrêmes demeurent toujours d’actualité.

- Le voyage alpin. D’après Claude Gardien (« Les Nouveaux Alpinistes ») ce sont « le désir d’immersion » et « l’amour immodéré pour leurs montagnes » qui guident les alpinistes vers leurs grandes traversées de l’arc alpin.
Ainsi en août 2000, Patrick Berhault entame un long périple qui le mènera des Alpes slovènes aux Alpes maritimes. Ses talentueux compagnons de cordée Patrick Edlinger, Pierre Magnin, Patrick Gabarrou, Ottavio Fassini, Valérie Aubagne, Gaël Bouquet des Chaux et Tomaz Huma partegeront avec lui l’ascension de voies mythiques ; Triglav, Cima Ovest, Cima Grande, Civetta punta Tissi, Civetta cima Su Alto, Marmolada, Marmolada di Rocca, Crozzon di Brenta, Brenta Alta, Cengalo, Piz Badile, Grandes Jorasses face nord, Mont-Blanc, Hypercouloir puis arête du Brouillard, Cervin face nord, Eiger face nord, Grande Casse face nord, aiguilles d'Arves, Meije face sud, Dôme de neige des Écrins, traversée du Viso, Corno Stella, Marguareis pointe Scarasson. Il réalisera certaines de ces voies d’envergure en solo.
Le voyage alpin est une sorte de prolongement des enchaînements en « style alpin » qui requièrent rapidité et légèreté. Beaucoup d’alpinistes chevronnés ont construit les projets les plus audacieux, et si Patrick Berhault n’est pas parvenu au bout de sa réalisation des quatre-vingt-deux 4000 m des Alpes, d’autres comme le Suisse Ueli Steck en 2015 et plus récemment en 2017 la Française Liv Sansoz achèveront son œuvre.

Cent-cinquante-trois ans après sa naissance, l’alpinisme s’est nettement démocratisé grâce au perfectionnement du matériel, avec l’arrivée des cartes et récemment du GPS. Les itinéraires qui jouissent d’une image médiatique forte deviennent surfréquentés. Une des conséquences est l’instauration d’une réglementation de l’accès à certains sites. Dès 2019, l’ascension du toit de l’Europe par sa voie « normale » pour les personnes non accompagnées par un guide sera limité. Même si les contours de cet encadrement ne sont pas encore très définis, un quota de 214 alpinistes par jour serait fixé.

Mais, loin des foules, demeurent des lieux préservés où l’alpiniste, quel que soit son niveau, peut évoluer en toute liberté. Les valeurs d’engagement parfois de renoncement, le plaisir du partage et l’esprit de solidarité, lui servent de guide dans l’univers fascinant des Alpes. L’alpinisme est avant tout une rencontre avec soi-même dans un milieu unique où rien n’est jamais acquis.

Alpinisme-Références bibliographiques