Comment les Alpes se situent-elles par rapport au concept de frontières ?
Si l’on considère la chaine alpine dans son ensemble, il est évident qu’elle est constituée d’un ensemble de frontières, pas moins de 8 états se partagent cette étendue. Mais la notion de frontière surtout lorsqu’il s’agit des Alpes ne doit pas être envisagée sous un angle exclusivement politique. L’imaginaire de la limite joue un rôle important dans une vision de cet espace.
En premier lieu, les Alpes représentent une cloison physique qui conditionne souvent une limite territoriale. Cette barrière détermine la division de la montagne alpine en un ensemble de régions naturelles. Ce découpage est fondé sur les critères et repères qui établissent les frontières nationales ; cours d'eau, lignes de partage des eaux et surtout grandes lignes de relief. Cependant, les similitudes culturelles, les échanges économiques internes, l’homogénéité du territoire viennent s’opposer à l’idée d’une forte différence entre les deux versants de la montagne. La notion de frontière politique revêt alors un caractère artificiel.
Frontières naturelles
« comment la notion de frontière naturelle a-t-elle été appliquée à d’autres limites que celles qui bornent les États ? »
Anne Sgard pose la question au sujet des délimitations des massifs alpins proposées par les géographes.
Les Alpes ont au cours de l’histoire endossé tantôt un rôle de séparation, tantôt un rôle de carrefour. Réduite par les Romains à un réseau de communications, la chaine alpine trouve son identité culturelle au moyen âge. La montée des nationalismes au 19e siècle inscrit dans le sol et les mentalités le concept de limite politique. De nos jours, la situation centrale du massif au coeur du continent européen lui confère un nouveau statut, “ une région, dans sa consistance propre et dans une spécificité qui transgresse les divisions politiques » estime Marie-Christine Fourny.
Une identité légitimée
La légitimité de cette nouvelle condition s’affirme au travers d’institutions telles la Convention Alpine, fondée en 1991, constituée à la suite de la conférence des ministres de l’environnement des pays alpins qui s’est déroulée à Berchtesgaden en 1989.
Convaincue « qu'il y a lieu d'harmoniser les intérêts économiques et les exigences écologiques », la Convention considère que les Alpes « constituent l'un des plus grands espaces naturels d'un seul tenant en Europe et un cadre de vie, un espace économique, culturel et récréatif au coeur de l'Europe, se distinguant par sa nature, sa culture et son histoire spécifiques et variées, auquel participent de nombreux peuples et pays ».